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Phantéidolie hallucinosique de l’hémicorps droit

Publié par Docteur Foucaud Du Boisguéheneuc, 10 / 06 / 2015 / Imprimer cette page
Auteurs : F. du Boisguéheneuc, A. Schneider, A. Berthomet, J. Ciron

 

Un patient de 31 ans est hospitalisé pour des difficultés d’élocution avec compréhension altérée et hémiparésie ataxique droite. Antécédent de migraine avec aura. Dans les heures qui suivent, mutisme avec hémiplégie droite, hémianopsie latérale homonyme droite. Puis limitation de la verticalité du regard vers le haut, paralysie de l’abduction et mydriase de l’œil gauche. Le tableau s’améliore en 48 heures. Il ne reste plus à l’examen qu’une diplopie. Le patient rapporte alors les faits suivants :

 

« J’étais dans la salle de bain à m’occuper de ma fille. Je me suis penché pour ramasser un élastique à cheveux. J’ai senti un étourdissement, je me suis trouvé plaqué au sol. Je voyais comme en deux : une image à droite, une image à gauche. Je me suis allongé sur le lit. Et puis des symptômes plus importants sont apparus : j’ai commencé à être paralysé du bras droit et de la jambe droite. J’avais du mal à parler. Je comprenais, j’avais envie de répondre mais je n’y arrivais pas. J’ai commencé à dire des choses incohérentes. Je me souviens que j’ai dit que ça irait mieux quand j’aurai raccroché mon leurre de pêche au bout de ma canne. C’est comme ça que ma femme a pris conscience qu’il se passait quelque chose. Moi je me rendais compte de la situation, je savais qu’il se passait quelque chose mais sans que ça me fasse peur, ça me faisait rigoler, j’étais dans l’euphorie, un peu comme quand on est saoul.

 

Ensuite j’ai eu des hallucinations. Sur la route pour aller à l’hôpital, mon champ de vision était coupé en deux, légèrement arrondi en haut : à gauche, je voyais ma femme en train de conduire, il faisait nuit, à droite, j’étais dans mon jardin, je voyais mon chien, je le caressais, je sentais son poil, je sentais qu’il me léchait la main, ça me paraissait vraiment réel. Quand je regardais à gauche, je revoyais ma femme. J’avais l’impression de tourner la tête. A gauche, c’était la réalité, à droite, c’était la fiction. Aux urgences on m’a demandé de lever mon bras. Je le voyais se lever, je le sentais en l’air, je disais : « voilà, je l’ai fait », et tout d’un coup, je me rendais compte qu’il n’avait pas bougé de la table. Au scanner, je perdais la sensation de mon bras. Je me rendais compte que mon bras pendait et à d’autres moments je ne le sentais plus, j’avais l’impression qu’il était le long de mon corps. Ensuite je suis complètement parti dans des rêves, je les vivais comme si c’était la réalité. »

 

IRM: ischémie thalamique gauche

IRM : infarctus thalamique gauche

Ce patient a présenté dans les suites d’un infarctus thalamique antérieur gauche une diplopie mentale : la perception de la réalité dans son hémichamp gauche alternant avec un vécu onirique dans son hémichamp droit. L’alternance pouvait se faire par un simple changement d’orientation de son attention et les deux états de conscience étaient vécus avec le même degré de réalité. Il est possible que la sensation de caresser son chien soit la projection hallucinatoire (phantéidolie) des phénomènes sensitifs vécus dans son membre supérieur droit (Henri Ey, 1973).

 

Henri Ey. Traité des hallucinations. Paris, Masson, 1973.

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